Bula,
Suva, la capitale

Nous sommes arrivĂ©s aux Fiji depuis 2 semaines dĂ©jĂ  mais pour le moment, nous demeurons « coincĂ©s Â» Ă  la capitale Suva. La traversĂ©e depuis les Tonga s’est relativement bien passĂ©e, les alizĂ©s ont bien portĂ© le Mootea qui avançait Ă  7 nĹ“uds, mais nous avons du supporter une mer bien agitĂ©e pour ne pas changer… L’essentiel problème de la mer agitĂ©e est que tout valse dans le bateau (mais cela on peut y remĂ©dier en accrochant tout) et qu’il est extrĂŞmement difficile de se faire Ă  manger. Si les deux premiers jours de navigation cela ne nous pose pas trop de problème (le temps de s’amariner et de retrouver la sensation de faim), 48 heures passĂ©es, on commence Ă  se lasser des pâtes Ă  l’eau et autres biscuits secs avalĂ©s Ă  la va-vite. C’est donc plein d’enthousiasme que le 3ème jour de croisière, on s’est mis en tĂŞte de prĂ©parer une tarte provençale. Ce qui peut vous paraĂ®tre simplissime Ă  première vue… La première difficultĂ© consiste en tenir en place avec le pot de farine dans les mains alors que le bateau, cognant contre les vagues, a tendance Ă  propulser choses et humains d’un bord Ă  l’autre du voilier ; qui plus est n’est pas droit mais penchĂ©. Une fois la pâte pĂ©trie et les ingrĂ©dients dĂ©coupĂ©s, arrive le douloureux moment de la cuisson… Car malgrĂ© tous les ingĂ©nieux arrangements du capitaine pour faire tenir le plat en place dans le four, la houle en dĂ©cide tout autrement. En fait pour rĂ©sumer, la moitiĂ© des ingrĂ©dients a tendance Ă  valser d’un cĂ´tĂ© de la piteuse tarte (qui ne ressemble plus Ă  rien) quant Ă  l’autre moitiĂ©, elle se retrouve dans le four mais plus dans le plat. Qu’importe, on a faim et on ne va pas se laisser dĂ©monter (ah ah ah comme cette satanĂ©e mer), Ă  nous les aromes de Provence ! On essaye de se caler dans le bateau pour tenir assis, on se sert de la tarte dans de misĂ©rables assiettes en plastique creuses, on remet tant bien que mal quelques tomates et bouts de fromage sur la pâte puis on ingurgite ça avec les doigts… top glamour le repas ! A ce moment, on se regarde et on se dit que c’est vraiment la misère : malgrĂ© une heure de cuisson la pâte est pratiquement crue. Panne de gaz en pleine mer !
L'enfer de Suva Mouillage devant le port La prison

C’est, fatiguĂ©s et en pleine nuit que nous sommes arrivĂ©s Ă  Suva ; impossible de ralentir le bateau malgrĂ© la rĂ©duction des voiles. Un peu de stress en raison de la panne de notre sondeur ; d’ailleurs on a failli s’échouer, ne voyant rien de nuit… Le lendemain, nous avons du attendre l’arrivĂ©e des officiers de la douane, de l’immigration, de la santĂ© et de l’agriculture Ă  bord avant de pouvoir dĂ©barquer. Il a fallu aussi remplir plein de paperasses en plein d’exemplaires ce qui Ă©tait fastidieux et Ă  nos yeux inutile. Puis nous avons dĂ©couvert Suva, Ă©blouis, il faut l’avouer, par la sociĂ©tĂ© de consommation. Les magasins nous font tourner la tĂŞte ; cela faisant presque 3 mois que nous n’avions pas vu de grande ville, cela nous a fait tout drĂ´le. L’abondance mais surtout la diversitĂ© de la nourriture nous captive. Il ne faut pas croire que nous avons faim en bateau, non !!!! C’est juste que la diversitĂ© et les produits frais nous manquent. Lorsque tu voyages en bateau, tu ne peux pas dire : « il me manque ça, je vais aller le chercher au monoprix ». Par exemple pour notre fille Maya, bien que nous soyons partis avec des dizaines de petits pots ; parfois les protĂ©ines manquent. Florent doit donc plonger pour pĂŞcher et il revient avec le dĂ©jeuner de notre bĂ©bĂ© !
Fiji_010.jpg Suva, ville rigolote

En arrivant aux Fiji, nous avons quittĂ© la PolynĂ©sie pour entrer en MĂ©lanĂ©sie. Les Ă®les Fiji sont constituĂ©es de 330 Ă®les diffĂ©rentes dont deux principales, plus grandes et plus peuplĂ©es. Les gens sont très accueillants, gentils et serviables sans rien attendre en retour. Ce pays est assez surprenant par la composition de sa population. Au dĂ©but du XIXème siècle, Ă©normĂ©ment d’indiens sont venus travailler au Fiji dans les plantations de canne Ă  sucre. Bosseurs et fĂ©conds, ils ont prospĂ©rĂ©s, Ă  tel point qu’à prĂ©sent, ils dĂ©tiennent la vie Ă©conomique du pays et constituent 45% de la population fidjienne ! HĂ©las, il y a très peu de mĂ©tissage entre les indiens et les mĂ©lanĂ©siens ; ils vivent en bonne entente mais cĂ´te Ă  cĂ´te. Ici, on parle anglais, mĂ©lanĂ©sien et hindi. Temples hindous, mosquĂ©es et Ă©glises se cĂ´toient dans la tolĂ©rance. Il y a « juste Â» des coups d’états rĂ©currents quand les Ă©lecteurs ont la mauvaise idĂ©e d’élire (dĂ©mocratiquement) un premier ministre d’origine indienne, des putschistes mĂ©lanĂ©siens reprennent alors le pouvoir !
La culture indienne est très prĂ©sente : de belles indiennes se baladent en sari et de succulents restos indiens se font concurrence. Autre choses surprenante : Ă  Suva, il y a des mendiants dans les rues, ce qui aurait Ă©tĂ© impensable dans les prĂ©cĂ©dentes Ă®les que nous avons visitĂ©es. Car elles font partie de la PolynĂ©sie oĂą la mendicitĂ©, très mal vue par les polynĂ©siens, y est proscrite.
Fiji_019.jpg Pas d vitre : c'est la clim locale! Fiji_063.jpg

Si nous sommes restĂ©s aussi « longtemps Â» Ă  Suva, c’était pour effectuer quelques rĂ©parations et amĂ©liorations sur le Mootea. RĂ©paration de notre voile dĂ©chirĂ©e, remplissage du gaz (c’est mieux pour la tarte provençale), commande de nouveaux matelas, achat d’un nouveau sondeur et d’un groupe Ă©lectrogène. On en avait marre de manquer d’énergie dans le bateau, nos panneaux solaires Ă©tant insuffisants lors des journĂ©es peu ensoleillĂ©es. On s’est donc offert un beau groupe Ă©lectrogène mais ça fait un raffut d’enfer !
Nous avons commandĂ© notre sondeur par internet, on Ă©tait super contents car il est arrivĂ© hyper rapidement de Singapour ; après avoir rempli des dizaines de paperasses Ă  la douane et avoir dĂ» embarquer un officier des douanes sur le bateau pour la rĂ©ception du paquet (vraie farce !) ; on s’est rendu compte qu’on avait commandĂ© le mauvais modèle. Quelle dĂ©ception, perte de temps et d’argent ! MalgrĂ© le risque, nous avons dĂ©cidĂ© de naviguer sans sondeur jusqu’en CalĂ©donie…
Cela ne pose pas de problème lorsque l’on navigue sur l’océan car il y a des milliers de mètres de profondeur mais cet instrument est nécessaire dans les archipels bourrés de récifs et autres îlots comme les Fiji. Pour jeter l’ancre quelque part, un sondeur est aussi très utile car l’on doit savoir la profondeur pour calculer le nombre de mètres de chaîne à mettre.

Mama au marché Fruits de mer Vendeur de kava Epices

Nous avons passĂ©s la première semaine Ă  Suva, mouillĂ© dans le port de commerce entre nappes de gasoil, bruits de moteur et autres odeurs nausĂ©abondes. C’était le seul endroit oĂą l’on pouvait laisser le bateau et dĂ©barquer Ă  terre en passant par le yacht club qui te rackette de 8 dollars par jour juste pour avoir le droit de laisser ton dinghy et jeter tes poubelles. On pourrait aussi y remplir les rĂ©servoirs du bateau d’eau… C’est bien ce que nous avions l’intention de faire et c’est en suivant leurs scrupuleuses indications pour nous mettre Ă  quai, que nous nous sommes Ă©chouĂ©s juste devant le yacht club après avoir percutĂ© une patate de corail ! Quel drĂ´le d’effet quand le bateau stoppe net plantĂ© dans la vase ! MalgrĂ© le moteur Ă  fond, nous n’arrivions pas Ă  nous sortir de cette mauvaise passe et nous avions beau appeler sur la VHF pour qu’ils viennent nous aider ; personne n’est venu ! Au bout d’une demi heure et on ne sait par quel miracle, on a rĂ©ussi Ă  faire bouger le Mootea et retourner au mouillage. On Ă©tait furax et c’est ce qu’on ne s’est pas gĂŞnĂ© de leur dire. Ce qui a fini en belle engueulade et pour conclure, ils nous ont dit que si nous n’étions pas contents, nous n’avions qu’à aller mouiller ailleurs. Mais oĂą ? Le seul autre endroit Ă©tait situĂ© Ă  5 km de Suva devant un hĂ´tel oĂą nous nous Ă©tions dĂ©jĂ  renseignĂ©s, mais on s’était fait rembarrĂ©s sous prĂ©texte que toutes les places Ă©taient prises. Florent et moi Ă©tions rouges de colère, inquiets pour la coque du bateau, Ă©tait-elle endommagĂ©e par le choc ? Mais impossible de plonger dans le port pour vĂ©rifier, l’eau Ă©tant opaque. Nous sommes retournĂ©s Ă  l’hĂ´tel aussi sec pour redemander l’autorisation de mouiller devant chez eux. Le hasard nous a fait rencontrer sur le ponton un marin dĂ©barquant de son immense et magnifique voilier, nous lui avons demandĂ© qui Ă©tait le responsable des corps morts (bouĂ©es de mouillage oĂą l’on peut attacher le bateau). Il nous a rĂ©pondu le plus simplement du monde et gentiment : « prenez celle lĂ  Ă  gauche Â» après nous avoir expliquĂ© en dĂ©tail par oĂą passer après qu’on lui ai dit que notre sondeur Ă©tait en panne. Mais, mais ? A qui ça appartient ? A qui on doit payer (car ce genre de choses est TOUJOURS payant) ? RĂ©ponse : Ă  personne ! Les corps morts appartiennent Ă  mon super copain qui habite la maison (le palais) juste en face avec son ponton privĂ© (pour son voilier de 25 mètres) et ses corps morts rĂ©servĂ©s Ă  ses amis. Mais ? mais ? Ne vous inquiĂ©tez pas, je lui en parlerai, amarrez-vous lĂ , il n’y a pas de problème. On Ă©tait fous de joie et surtout excitĂ©s Ă  l’idĂ©e de faire un beau bras d’honneur Ă  ces abrutis du « yacht club Â» (qui s’apparente plus Ă  un bar pour poivrots qu’à autre chose) !

En arrivant dans notre nouveau mouillage, nous avons fait la connaissance de notre nouveau voisin, Don, qui venait de s’amocher la face en tombant de son vĂ©lo ; LeĂŻla a pu donc jouer au docteur en collant quelques stĂ©ristrips !


A SUIVRE ...

Mouillage Lami Mouillage paradisiaque


ComplĂ©ment sur Suva Ă  l’attention des futurs navigateurs :


Sur les 4 ports d’entrĂ©e des Fiji (Suva, Levuka, Lautoka, Savu Savu), il ne faut pas faire Suva en premier car les autoritĂ©s portuaires en profitent pour racketter en crĂ©ant toute sorte de taxe comme dans notre cas, les frais de dĂ©placement : 106 dollars ! et en plus ils te font un reçu avec un grand sourire !
On a Ă©tĂ© fortement déçu par le Yacht Club de Suva qui profite de son monopole pour pratiquer un vĂ©ritable racket ; tu payes 8 dollars par jour pour ton annexe et dĂ©poser tes poubelles, c’est tout ! Il n’y a pas de corps mort et le mouillage est dĂ©gueulasse ; la forte odeur de gasoil devient vite insupportable (et je ne parle mĂŞme pas du bruit) ; pour faire de l’eau, on a suivi les conseils du club et on s’est bien plantĂ© car l’entrĂ©e de la marina doit se faire impĂ©rativement Ă  marĂ©e haute, contrairement Ă  ce qu’ils nous ont dit ! On a lancĂ© un appel Ă  la VHF et personne n’est venu, le bateau du yacht club est passĂ© Ă  10 mètres de nous mais ne s’est pas arrĂŞtĂ© car… il pĂŞchait ! Le directeur nous dira par la suite que le yacht club n’est pas un centre d’assistance et prĂ©cisera que nos 8 dollars ne servent pas qu’à l’annexe mais donne aussi l’accès au bar et au restaurant, payant bien sur…
Pour effectuer des rĂ©parations, il ne faut pas s’adresser au yacht club ; le directeur nous a chaudement recommandĂ© Anton (un des piliers du bar) et il s’est bien foutu de notre gueule ; on est donc allĂ© Ă  APM (Asia Pacific Management) dans la zone industrielle de Lami Town, qui nous a rĂ©parĂ© notre voile pour moins cher et pour un travail bien fait.
Après notre Ă©chouage, on s’est bien fâchĂ© avec le directeur qui nous a dit que de toute façon, on avait pas le choix, sinon de dĂ©barquer au port de commerce ; et bien si, il existe un autre mouillage Ă  moins de 2 miles au nord-ouest de Suva, devant le Tradewinds HĂ´tel ; sur la droite, la belle maison avec le superbe ketch de 20 mètres appartient Ă  un richissime Fidjien et la demi douzaine de corps mort devant sa maison sont Ă  lui et c’est gratuit ! Et cerise sur le gâteau : Internet gratuit par le wifi ! Par courtoisie, mieux vaut demander l’autorisation au propriĂ©taire. On dĂ©barque facilement par la petite marina devant l’hĂ´tel et on peut faire de l’eau ; ce mouillage est calme et propre et c’est un trou Ă  cyclone.

Guides : A Yachtsman’ Fiji, par Michael Calder et Fiji Islands Yachting (guide officiel) qui donne les procĂ©dures d’arrivĂ©es et toutes les adresses Ă  terre pour rĂ©parer (dispo en annexe ci dessous)


Le  yacht club